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LES CREVETTES PAILLETÉES

La fiche

Réalisé par Cédric Le Gallo & Maxime Govare  – Avec Nicolas Gob, Alban Lenoir, Michaël Abiteboul…
France – Comédie – Sortie : 8 mai 2019 – Durée : 100 mn

Synopsis : Après avoir tenu des propos homophobes, Mathias Le Goff, vice-champion du monde de natation, est condamné à entraîner « Les Crevettes Pailletées », une équipe de water-polo gay, davantage motivée par la fête que par la compétition. Cet explosif attelage va alors se rendre en Croatie pour participer aux Gay Games, le plus grand rassemblement sportif homosexuel du monde. Le chemin parcouru sera l’occasion pour Mathias de découvrir un univers décalé qui va bousculer tous ses repères et lui permettre de revoir ses priorités dans la vie

La critique du film

Écarté de la fédération de natation après des propos homophobes en direct à la télévision, un nageur homophobe doit, pour s’amender et retrouver un jour la compétition, entraîner la première équipe de nageurs homosexuels, affublée du nom joyeusement flashy Les crevettes pailletées. Parce que, comme cela était si subtilement expliquée dans la bande-annonce : « Dans la crevette, la meilleure partie, c’est la queue. Et puis avec des paillettes, c’est mieux ! ».

Cette comédie finalement assez classique, expédiée en une heure et demie, parvient difficilement à atteindre le niveau d’un Rasta Rocket et se révèle n’être qu’un pastiche gay, niaiseux et communautaire, du Grand Bain de Gilles Lellouche, la profondeur dramatique en moins. Le film sera une de ces comédies joyeuses et gentiment vulgaires sur l’acceptation et le regard des autres. Mais avec un peu de gravité tout de même. Le ton est donné, et même assez vite. C’est encore un de ces nombreux films – car il commence à y en avoir beaucoup – sur un personnage a priori fermé et réac qui se retrouve confronté à un univers radicalement différent du sien. Un voyage initiatique qui lui permettra de reconnecter avec lui-même et avec les siens (en l’occurrence ici, sa fille, dont il a la garde partagée et qui s’appelle Victoire – logique, c’est un ancien champion).

Le grand bain des clichés

On a quand même plaisir à retrouver Nicolas Gob, qui avait précisément démarré au petit écran dans un rôle de flic gay dans Les bleus, premiers pas dans la police mais s’était fait plus rare ces derniers temps. Sauf que son personnage de basique trentenaire hétérobeauf un peu macho semble perdu dans une espèce de safari dans le Marais entouré de clichetons ambulants. A croire qu’il est encore difficile en 2019 de parler d’homosexualité en France au cinéma sans tomber dans le militantisme (120 battements par minute), la posture intello-bourgeoise voire le glauque et l’interlope (Un couteau dans le cœur) ou ici, le vulgaire. Si le film fait l’effort d’aborder la parentalité gay et l’homophobie encore vive dans les campagnes, les personnages souffrent de demeurer sous-écrits, jamais vraiment développés.

Les crevettes pailletées
Dommage car les réalisateurs ont fait appel à une palette d’acteurs talentueux et de jeunes espoirs du cinéma français, que ce soit David Baïot qui prend son envol après Plus belle la vie et Ainsi soient-ils, Alban Lenoir, qui portait le film Un français sur ses épaules ou encore Geoffrey Couët, l’un des rôles-titres du plus confidentiel Théo et Hugo dans le même bateau. Tous sont honnêtes dans leur jeu mais semblent se débattre avec un texte faible et des blagues convenues. Le film est touchant dans sa volonté maladroite de montrer des personnages gays avec des histoires parfois complexes. Comme l’explique l’un d’entre eux à l’entraîneur homophobe, être gay signifie aussi avoir des problèmes légèrement plus compliqués que le choix de sa garde-robe ou du bar où sortir le soir même.

Quand y’a d’la gêne, y’a moins d’plaisir

Malgré tout subsiste le sentiment d’un film raté. Il y a du divertissement, de la gêne aussi, mais en quittant la salle, on a presque déjà oublié ce qu’on vient de voir, tant l’argument était léger. Sans rien spoiler, même le dénouement est finalement assez prévisible. Quant au manque de rythme du film, il est faiblement compensé par des morceaux d’électro qui semblent redonner un coup de jus quand l’action s’épuise (puisque oui, c’est vrai, quand on est gay, on passe forcément son temps en boîte de nuit à se trémousser sur du Rihanna). Si vous ne l’aviez pas compris encore, tous les clichés y passent, jusqu’aux soirées en boîte où on prend un « Mary Poppers » quand on a envie de se défoncer.

Même les éventuels points de tension ou problèmes qui font débat y compris au sein de la communauté gay – l’acceptation des trans, l’adoption de modes de vie hétéronomes avec le mariage pour tous – sont abordés de façon superficielle et vite évacués. L’homosexualité y est réduite à sa dimension strictement sexuelle, anale, quitte à sombrer assez vite dans la vulgarité, quand par exemple un des membres de l’équipe exhibe fièrement son nouveau tatouage de Ryan Gosling situé évidemment …entre ses fesses.  On trouve chez les réalisateurs une volonté affichée de cocher toutes les cases, jusque dans le choix des personnages – le trans, le papa gay, le jeune clubber sexuellement libéré – quitte à nous imposer pour la millième fois la chanson Kid sur la virilité d’Eddy de Pretto à la fin, au cas où on n’aurait pas compris que derrière cette heure et demie de frivolité, le message en fait, c’était que la masculinité toxique, c’est mal.



La bande-annonce

Au cinéma le 8 mai




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