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LE LYCÉEN

Lucas a 17 ans quand soudain son adolescence vole en éclats. Avec l’aide de son frère, monté à Paris, et de sa mère, avec qui il vit désormais seul, il va devoir lutter pour apprendre à espérer et aimer de nouveau.

Critique du film

Avec quinze films en une vingtaine d’années, Christophe Honoré est devenu une voix qui compte dans le cinéma français contemporain. C’est également un révélateur de talents et de nouveaux visages, tel Louis Garrel en 2004 pour Ma mère, où il jouait aux cotés d’Isabelle Huppert. Le Lycéen, son nouveau long-métrage, est aussi l’occasion de découvrir Paul Kircher, qui incarne Lucas, adolescent qui doit gérer la mort son père, décédé brutalement dans un accident de voiture. Le nouveau venu est accompagné par les visages plus identifiables que sont Juliette Binoche et Vincent Lacoste, respectivement sa mère et son frère le temps d’un film. Lucas est le point d’entrée du spectateur dans un récit qui se raconte comme un journal intime, le jeune homme racontant ses moments troublés de son existence comme autant d’entrées dans son quotidien.

Cette narration syncopée est le premier aspect charmant du film, qui semble reprendre les accents familiers déjà développés par le cinéaste dans certains de ses films précédents, on pense évidemment à sa « trilogie de l’hiver » où brillait les Chansons d’amour (2007). Si le propos est dur, la candeur du personnage permet au récit de ne pas s’enliser dans une lourdeur propre à beaucoup d’histoires de deuil, ce thème si difficile à développer sur grand écran. Mais est-il vraiment question de cela dans Le lycéen ? Plus que le dépassement de la mort d’un parent, il semble se jouer beaucoup d’autres enjeux pour Lucas. L’énonciation de son homosexualité, qu’il rend pour responsable d’une distance avec son père, la façon dont il se refuse à aimer, préférant consommer des relations sans passion ou sans lendemains, tous ces sujets sont aussi au centre de notre attention.

Le lycéen
La radicalité de la réaction de Lucas, plongeant dans la dépression la plus noire, est le témoin d’un moment de destruction du « moi », où même le fait de parler n’est plus concevable. Lucas trimballe ses différences sans plus savoir qu’en faire, se nourrissant avec désespoir de la chaleur de l’autre à défaut d’avoir en lui le foyer nécessaire à la poursuite du quotidien. La plus belle des rencontres intervient sans doute en la personne de Lilio, qui partage l’appartement du frère aîné, ancien camarade sur les bancs des Beaux-Arts. Cet homme plus âgé devient un phare dans la nuit d’encre que sont devenus les jours de Lucas, et ce n’est pas un hasard si c’est lui qui réussit à l’extirper de son mutisme et à enclencher le nouveau chapitre de sa vie. Loin des clichés d’une histoire d’amour opportuniste et trop facile, Honoré développe un personnage embarrassé par l’amour du jeune frère de son ami, mais aussi soucieux de sa santé et de son bien être.

Là encore on retrouve la sensibilité qui parcourt toute l’oeuvre de l’auteur de Dans Paris, qui, déjà, dans ce film précédent, interrogeait le motif de la dépression et les abysses nécessaires à éprouver pour espérer vivre, de nouveau. La caméra de Christophe Honoré ne cesse de tourner autour des états d’âme de Lucas, creusant toujours plus profond dans cette crise existentielle qui aurait pu l’emporter pour de bon. Il faut noter également la justesse du jeu d’un Vincent Lacoste qui ne cesse de progresser, délaissant pour de bon son personnage de jeune bohème aux cheveux hirsutes, pour incarner un adulte responsable et dur, peinant à comprendre ce jeune frère fragile aux comportements imprévisibles. Le lycéen est le film d’une renaissance, au cœur de l’hiver qu’aime tant représenter Honoré, un palpitant brûlant à la mise en scène subtile qui interroge toujours aussi finement les troubles de la jeunesse.

Bande-annonce

30 novembre 2022 – De Christophe Honoré, avec Paul Kircher, Vincent Lacoste et Juliette Binoche.




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