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LE GANGSTER, LE FLIC & L’ASSASSIN

La fiche

Réalisé par Lee Won-Tae – Avec Ma Dong-seok, Kim Moo-yul, Kim Sung-kyu – Thriller, Action – Corée du Sud – 14 août 2019 – 1h50

Un puissant chef de gang dont la férocité est redoutée dans le milieu manque de se faire assassiner par un homme qui prend la fuite sans être identifié. S’il a survécu de justesse à l’attaque, le gangster sait que sa réputation est irrémédiablement endommagée : il doit retrouver l’assassin et le faire payer.

La critique du film

Il y a parfois des choses comme ça, sur lesquelles tout le monde ou presque semble s’accorder : ainsi, les Américains feraient de bons westerns, les suédois de bons polars, et les Coréens seraient les maîtres du thriller moderne… Le Gangster, le Flic et l’Assassin appartient à cette troisième catégorie.

Il s’agit du deuxième film de Lee Won-tae, après le drame historique Man of Will (2017) consacré à Kim Koo, figure de la résistance coréenne durant l’occupation japonaise. Avec ce nouveau film, le metteur-en-scène opère un changement radical de registre et s’adonne cette fois au film de genre, tendance brutale. Une nouvelle corde à son arc qui lui a ouvert les portes du Festival de Cannes. Car si cette 72e édition cannoise a bien évidemment été marquée par la Palme d’or de Bong Joon-ho pour Parasite, Lee Won-tae était l’autre représentant du pays du Matin calme avec Le Gangster, le Flic et l’Assassin. Projeté hors-compétition, il a ainsi perpétué la tradition des films coréens en Séance de Minuit à Cannes. Depuis 2014, c’est en effet la sixième édition consécutive à voir au moins un film originaire de ce pays sélectionné dans cette catégorie. Signe que la Corée du Sud s’est fait une véritable spécialité de ce genre de film depuis plus de quinze ans maintenant, et le film de Lee Won-tae en est un digne représentant.

Comme son nom l’indique

On pourrait développer sur l’histoire et les enjeux du film, mais pour être honnête, tout est déjà plus ou moins dit dans le titre. Un gangster, un flic et un assassin, pas besoin de faire un dessin, on devine assez bien ce qui nous attend. C’est un peu moins vrai avec le titre original du film, 악인전 (Ak-in-jeon), que l’on pourrait traduire littéralement par « Les mauvaises personnes » ou « Les méchants ». On comprend ici que tous les protagonistes du film ont leur face sombre, et sont prêts à tout pour parvenir à leur fin. 

Un gangster, qui voit son empire menacé, et un flic, à la poursuite d’un tueur, vont ainsi s’associer pour traquer un serial-killer qui sévit dans les rues de Séoul. Une collaboration entre deux adversaires dans la vie, qui vont mettre entre parenthèses leurs inimitiés et leurs oppositions pour éliminer une menace encore plus grande.

Super-Ma(n)

Mais si le titre français nous invite à une partie à trois, le film est d’abord le show Ma Dong-seok (au point qu’il aurait presque pu s’intituler « Le gangster et les autres ») ! Dès son apparition à l’image, le corps sculptural de l’acteur du Dernier train pour Busan impressionne par la puissance qu’il dégage. Torse-nu, frappant comme un sourd dans un punchingball, ses muscles gonflés peinent à rentrer dans le cadre de l’image. Avec son corps de taureau, Ma-Dong-seok offre toute sa carrure à ce gangster violent mais humain, ne se contentant pas de l’incarner physiquement. Il y a trop de bienveillance dans son regard pour l’imaginer incarner une ordure finie. C’est ce contraste entre cette montagne physique et la sensibilité de ses interprétations qui explique le succès de l’acteur. Celui qui se fait appeler Don Lee à l’international connaît ainsi une ascension fulgurante puisqu’il vient d’être annoncé au casting de The Eternals (Chloé Zao, 2020) le prochain film Marvel, où il jouera un super-héros aux côtés d’Angelina Jolie et Salma Hayek.

Ma Dong-seok
À ses côtés, Kim Mu-yeol est le flic, l’archétype de l’agent nerveux et impatient qui supporte mal que l’on se mette en travers de son chemin, et encore moins l’inertie de sa hiérarchie. Une figure classique du genre, popularisé par le personnage de Mel Gibson dans L’arme Fatale. Le duo formé par Kim Mu-yeol et Ma Dong-seok constitue le moteur du film, leur union contre-nature servant à la fois de ressort comique et de source aux multiples rebondissements.

Ne reste donc plus que l’assassin, interprété par Kim Sung-kyu, et qui constitue malheureusement l’une des principales déceptions du film. Son personnage a beau semer la terreur dans la ville, il est trop peu traité eu égard à ce que le titre nous promet. Outre un besoin irrépressible de tuer, ses motivations sont inconnues, et on peut regretter sa relative absence en comparaison du traitement de ses deux adversaires.

Un thriller solide

Le Gangster, le Flic et l’Assassin est un thriller efficace qui, à défaut d’être novateur, sait s’approprier les passages obligés du polar coréen. Comme dans la plupart de ces films, la police y est encore présentée comme inefficace et dépassée. Lee Won-tae connait les codes du genre et s’inspire de ses illustres prédécesseurs, qu’il s’agisse d’un affrontement opposant nos héros à une horde de gangsters façon Old Boy, ou bien quand il faut filmer une traque et des courses poursuites nocturnes dans les rues de Séoul comme dans The Chaser. Enfin, si la violence est au rendez-vous, elle n’atteint pas les sommets d’un J’ai rencontré le diable (c’est d’ailleurs sans doute pour surfer sur le succès de ce dernier que le titre anglais du film est The Gangster, the Cop, the Devil). La photo, quant à elle, est soignée et contrastée, et le rythme est globalement tenu tout du long, le film réservant régulièrement quelques moments de bravoures. La scène d’ouverture est ainsi particulièrement réussie et met d’entrée le spectateur dans l’ambiance.

Au final, l’objectif est atteint pour Lee Won-tae qui, s’il ne bouleverse pas les codes du genre, parvient à offrir un nouveau thriller solide. Ce n’est pas Sylvester Stallone qui dira le contraire, lui qui a acheté les droits du film en vue d’en produire un remake.



Bande-annonce

Hors compétition à Cannes 2019 // Au cinéma le 14 août




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