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LE BRUIT DU DEHORS

Daniela ne sait pas quoi faire. Elle est devenue insomniaque. Mia termine un master qu’elle a commencé spontanément. Leurs rencontres à Berlin et à Vienne pendant plusieurs mois. En compagnie de Natascha, une autre amie qui envisage de s’installer à Vienne, elles se promènent et discutent.

Critique du film

Fidèle à son économie minimaliste, Ted Fendt livre avec Le bruit du dehors un second long-métrage en accord avec ses œuvres précédentes : contemplatif, épuré et doux-amer. Promenant cette fois-ci sa caméra entre Berlin et Vienne, le réalisateur continue de filmer des acteurs.trices non-professionnelles et ses ami.e.s, qui portent à l’écran leurs prénoms de la vraie vie -Daniella, Mia et Natascha, et les suit dans leurs pérégrinations vaguement hasardeuses le temps d’un été indien allemand. Oscillant entre le documentaire et la fiction, Ted Fendt s’inscrit dans la lignée des cinéastes de la discussion philosophique que sont Éric Rohmer ou Hong-sang soo, et laisse ses personnages, des petits-bourgeois universitaires, flotter et se poser toutes sortes de questions existentielles : finir ou ne pas finir son master de recherche ? Travailler dans un musée ou une maison d’édition ? Partir ou rester ?

Film sur l’errance propre à la trentaine désoeuvrée, Le bruit du dehors, derrières ses images solaires sur pellicule, est plus mélancolique qu’il n’y paraît : la dépression et le spleen rôdent aux abords des vies des héroïnes, qui semblent toutes en prise avec un certain mal être et, peut être, des problèmes plus graves encore dont on ne saura rien. Ça et là, des références littéraires nous éclairent sur l’état d’esprit des protagonistes qui travaillent sur le thème du traumatisme : le recueil de poèmes Die gestundete Zeit (Le temps différé) de l’écrivaine autrichienne Ingeborg Bachmann, le roman verbeux et réflexif qu’est L’école des idiots de écrivain russe postmoderniste Sacha Sokolov.

Le bruit du dehors
“C’est étrange, ces jours vides où il ne se passe rien”, résume Mia avec lassitude. Entre insomnie et vague à l’âme, les personnages se cherchent, se croisent et se recroisent. Elles sont à un moment supposément charnière de la vie et une transition s’annonce, comme le laisse supposer le sujet de recherche de Mia, qui travaille sur les rites de passage, mais aussi la présence fugace d’une pleine lune d’équinoxe que remarque Daniella. Portrait de classe, de génération, de caractères, Le bruit du dehors flirte aussi avec l’ésotérisme, entre superstition et pendules.

Ted Fendt s’attache à placer l’amitié, celle qui se passe presque de mots, au centre de son récit, et en fait le point d’ancrage de ses trois ou quatre héroïnes : quand la vie vous ballotte, vous pouvez toujours vous raccrocher à ces personnes avec lesquelles vous n’avez -presque- pas besoin de parler. On se laisse gagner par le rythme lent, tantôt taiseux, tantôt éloquent, de ce film doux qui cherche à conjurer l’angoisse de vivre et à inventer l’art d’aller mieux.

Bande-annonce

1er juillet 2022 – De Ted Fendt, avec Daniela Zahlner, Mia Sellmann et Natascha Manthe.




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