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LE BLEU DU CAFTAN

Halim et sa femme Mina tiennent un magasin de caftans traditionnels dans la médina de Salé, au Maroc. Le couple a réussi à trouver son équilibre et à cacher le secret de Halim, son homosexualité. L’arrivée d’une nouvelle personne dans leur vie bouleverse leur quotidien, leurs sentiments et leurs espoirs de paix intérieure.

CRITIQUE DU FILM

En 2019, avec Adam, Maryam Touzani dénonçait le sort des femmes enceintes hors mariage au Maroc. Cette année, la réalisatrice poursuit son combat politique dans Le bleu du caftan, au travers duquel elle aborde un autre sujet tabou dans son pays : l’homosexualité.

Les premières secondes du film dévoilent un morceau de tissu bleu pétrole hypnotisant. Peu à peu, la caméra laisse apparaître les mains de Halim. Le maalem, artisan brodant des caftans d’une beauté inégalée, manie sa future œuvre avec une délicatesse infinie. Dès les premières images, Maryam Touzani confirme qu’elle est l’une des maîtresses de l’intimité, filmant tout en pudeur le quotidien mouvementé d’un couple inspirant. Dans Le bleu du caftan, l’amour se transmet à partir de gestes simples trop souvent délaissés. Le couple s’est construit grâce à cette accumulation de petites attentions et de détails qui ont renforcé leur relation, et ce malgré l’homosexualité de Halim.

Le silence est d’or

Les décors et les caftans de la boutique du couple servent une ambiance calme et feutrée, aux antipodes de la difficulté du sujet abordé. La forte place de l’interprétation fait du film de Maryam Touzani une œuvre pleinement humaine. Malgré un contexte difficile, Halim et Mina parviennent à s’aimer sincèrement et surmontent chaque épreuve. Et même lorsqu’ils se retrouvent confrontés à la pire des fatalités, ils multiplient les preuves d’amour les plus pures.

le bleu du caftan

La cinéaste mise sur la tendresse pour faire passer son message, sans jamais tomber dans le martèlement d’idées. Le mal-être de Halim est profond, mais aucun dialogue ne l’explicite. Son homosexualité n’est mentionnée qu’à une seule reprise, symbolisant l’ancrage de ce tabou dans une société profondément traditionaliste.

Mais Le bleu du caftan ne porte pas qu’un message politique. Maryam Touzani signe un long-métrage rempli d’espoir. L’arrivée d’une autre personne dans la vie de Halim et Mina est synonyme de bouleversement profond, mais aussi d’une perspective de transmission de l’art de la broderie manuelle. À travers les mains, les corps et les goûts, la réalisatrice nous offre une œuvre sensorielle insistant sur l’importance du contact et des preuves d’amour, dans un monde où les métiers manuels sont exposés aux dangers des machines et de la technologie.

Bijou visuel permis par la directrice de la photographie Virginie Surdej, qui parvient à donner une sensualité difficile à égaler, le film est également porté par un trio d’interprètes brillants : Ayoub Messioui, Saleh Bakri et la lumineuse Lubna Azabal, qui semble plus juste que jamais dans cette œuvre majeure.

Adrien Roche

Bande-annonce

22 mars 2023De Maryam Touzani, avec Lubna AzabalSaleh BakriAyoub Missioui




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