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LA PISCINE

À l’été 1968, Marianne et Jean-Paul, transis d’amour et profitant de leurs vacances à St Tropez, reçoivent dans leur villa un vieil ami de Marianne, accompagné de sa fille adolescente. Leur arrivée va mettre fin à la tranquillité estivale, agissant comme un parasite, révélatrice d’une myriade de non-dits au sein du jeune couple.

DU FILM HIPPIE AU THRILLER

Le décor de côte d’azur en plein été place immédiatement le spectateur dans une chaise longue, humide et brûlante, devant le tendre spectacle d’un couple qui s’aime, jouant avec toute l’insolence et l’énergie de la jeunesse. Alain Delon et Romy Schneider n’ont pas à faire semblant : leur relation ne se limite pas au plateau du film. L’atmosphère enjouée, rehaussée par la musique sensible de Michel Legrand, nous donnerait presque envie de les rejoindre au bord de cette piscine autour de laquelle ils courent, hilares. Mais voilà, sommes-nous ici pour leur tenir la chandelle ?

Jacques Deray, amateur de mystère et d’histoires sombres, n’a certainement pas pour but de nous offrir un film de vacances naïf et léger et c’est drôle : nous nous en doutons. Quand le film se noie gaiement, et avec beaucoup de finesse, dans la révolution sexuelle qui bat son plein alors, dans une ambiance résolument hippie, c’est pour mieux nous aveugler. Son réel propos n’a pas grand chose en commun avec La Party (1968) de Blake Edwards, quoiqu’il s’agisse aussi d’essayer de ne pas tomber dans la piscine. Cette grande fête censée avoir lieu, née du rassemblement de vieux amis qui se retrouvent, ne parvient pourtant pas à annihiler le mal-être du personnage de Jean-Paul, amant comblé à la paresse insolente, à l’exquise nonchalance. C’est la désinvolture cachant la douleur. Et quoi de mieux pour nous faire confondre les deux, que de raconter l’histoire sous l’étouffante chaleur estivale de la Provence !

Le sentiment d’agréable langueur mis en place au commencement du film va peu à peu devenir insupportable. Les quatre personnages vont et viennent autour de ce rectangle d’eau chlorée, cherchant un sens à leurs échanges, dissimulant des regards, et rien ne semble arrêter la chute inéluctable vers l’affrontement des rancœurs, vers l’explosion des secrets dévoilés. Chaque dialogue, chaque mouvement peut être interprété et suggérer quelque chose de bien plus noir que l’ennui, et de bien plus sournois que la simple fatigue accompagnant les jours de grand soleil. Chacun cache quelque chose, et la cohabitation prend des airs de prison.

Les morceaux de Michel Legrand, eux aussi, changent de ton, car tout le monde est complice. Les silences glacent l’atmosphère. Nous seuls cherchons encore à comprendre ce qui se trame, et c’est avec brio que l’intrigue est ainsi menée jusqu’à son terme. Les tenues et coiffures excentriques de Romy Schneider justifient l’artifice, la scène de théâtre enfin révélée. Le spectateur est berné. La Piscine, peut-être l’unique héroïne, donne l’étrange sensation d’avoir joué à un jeu, et d’y avoir perdu. 


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