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LA JETÉE

A la suite de la Troisième Guerre mondiale qui a détruit Paris, des survivants s’installent dans les souterrains de Chaillot. Pour sauver cette humanité condamnée, on décide de projeter dans le temps des émissaires qui appelleraient le passé et l’avenir au secours du présent. Un homme, envoyé dans le passé, y rencontre une femme et découvre avec elle le bonheur d’instants partagés. Devant le succès de ces expériences, on tente alors de l’acheminer dans le futur.

Cauchemar poétique

Pour résumer ce court-métrage à ceux qui ne l‘auraient jamais vu, disons qu’il s’agit d’une succession de photos en noir et blanc accompagnées d’une narration récitée par Jean Négroni, comédien de théâtre  qui fut un des compagnons de route de Jean Vilar et d’une musique de Trevor Duncan.

Ce film qu’on peut qualifier d’expérimental a été réalisé avec peu de moyens techniques, mais avec une exigence et une rigueur exemplaires de la part de son metteur-en-scène – Jean Négroni va jusqu’à dire dans un des suppléments que Chris Marker était très emmerdant sur le tournage. À la fois film de science-fiction, œuvre poétique et cauchemar psychanalytique sur le thème de l’impression de déjà-vu, La Jetée a marqué des générations de cinéphiles par son originalité formelle et sa beauté étrange. On y trouve des thèmes chers à Chris Marker : l’image, le souvenir, le temps et la subjectivité. 

La jetée film

Dans le coffret édité par Potemkine et disponible depuis le 1er décembre, on trouve la version livre du film supervisée par Chris Marker qui permet de se plonger et de se replonger dans chaque photo de cette œuvre dont on réalise encore mieux l’aspect miraculeux de la réussite et de la postérité, quand on tient compte des conditions de tournage très modestes et du projet totalement atypique dans le paysage cinématographique français de l’époque. 

Film inclassable qui parle aussi d’amour fou et de guerre, hommage au Vertigo d’Alfred Hitchcock, La Jetée n’a pas fini de nous interroger sur notre rapport au temps, à l’image et au rêve.

Cette nouvelle édition de La jetée comporte aussi les suppléments vidéo suivants :  Regards sur La Jetée par Jean-Michel Frodon (44 min) / Quand La Jetée croise Vertigo (10min) / Jean Négroni raconte le tournage de La Jetée (4 min) / Petite visite du bar La Jetée à Tokyo (2 min)

Sans soleil

À partir de lettres écrites lors de ses voyages sur différents continents, un caméraman, Sandor Krasna, questionne son rapport aux images qu’il filme, met en parallèle les civilisations et interroge la place de l’homme dans le monde.

Mémoire et Histoire

Avec Sans soleil, on fait un bond de 20 ans depuis La Jetée et on se retrouve avec une œuvre totalement différente dans la forme, mais tout aussi atypique, originale et mystérieuse. Il s’agit d’un documentaire ou d’un essai cinématographique qui peut paraître sauter du coq à l’âne à la première vision. Rassemblant des images prises sur le vif au Japon, en Guinée-Bissau et au Cap Vert, on est face à une œuvre très riche, un poème visuel et sonore, là aussi réalisé de façon presque artisanale. L’écrivaine Florence Delay lit les lettres de Sandor Krasna, caméraman imaginaire et double de Chris Marker, tandis que défilent sous nos yeux des images aussi hétéroclites que des fêtes de quartier au Japon, des ivrognes déambulant dans les rues, des rites funéraires, un temple consacré aux chats, mais aussi des dockers au Cap Vert, des femmes africaines sur un marché, dont on capte les regards intenses. 

Sans soleil Chris Marker

Il s’agit d’un film difficilement résumable, mais où les images qui concernent à la fois des choses prosaïques et sacrées, sont accompagnées de textes magnifiques qui n’illustrent jamais ce qui est montré. Il est question de la mémoire et de l’histoire, de la perception du temps. Il s’agit de retrouver le sens du sacré de chaque chose. Les couleurs sont magnifiques et la restauration de cette édition qu’on doit à Potemkine rend parfaitement justice à la beauté plastique de cette œuvre qui happe le spectateur dès les premières minutes pour ne plus le lâcher. 

Le livret de 224 pages qui accompagne Sans soleil permet, entre autre, d’analyser et de poser des mots plus facilement sur ce qu’on peut ressentir  en regardant ce film, de lui trouver une cohérence qu’on devine, mais qui reste indicible. Il comporte également des documents rédigés par Chris Marker lui-même.

Les suppléments vidéo sont les suivants :  Interview de Florence Delay / Le Labyrinthe d’herbes de  Shuji Terayama (1979 – Japon/France – 38 min) / Moyen métrage rare qui fait partie de l’ensemble Collections privées (avec un film de Just Jaeckin et un film de Walerian Borowczyk) / Tokyo Days de Chris Marker (1986 – France – 24 min) / Déambulation filmée de Chris Marker et Arielle Dombasle dans Tokyo / Version anglaise du film (uniquement sur le blu ray) dont le commentaire a été écrit par Chris Marker, et qui n’est pas sous-titrée selon son propre souhait.


Deux œuvres à redécouvrir qui nous parlent de la mort, inévitable, du destin de l’homme qui comporte quelque chose de terrible, car condamné dès le départ. Ces deux films sont donc à nouveau disponibles dans des éditions à la hauteur de leur singularité et de leur richesse thématique et formelle. 




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