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L’UNE CHANTE, L’AUTRE PAS

Deux jeunes femmes vivent à Paris en 1962. Pauline (17 ans), étudiante, rêve de quitter sa famille pour devenir chanteuse. Suzanne (22 ans) s’occupe de ses deux enfants et fait face au drame du suicide de leur père. La vie les sépare ; chacune vit son combat de femme. Pauline devient chanteuse dans un groupe militant et itinérant après avoir vécu une union difficile en Iran. Suzanne sort peu à peu de sa misère et travaille au Planning familial… L’UNE CHANTE, L’AUTRE PAS raconte l’histoire d’amitié indéfectible de ces deux femmes sur près de 15 ans. On y rit, on y pleure, on y chante !  

Quand on a 17 ans

Pauline, 17 ans, franchit le seuil d’une exposition de photographies. Les portraits de femmes se succèdent, d’un noir et blanc sinistre; les femmes elles sont plurielles, mais toujours tristes. “C’est quand même le genre femmes plaquées, battues, veuves, filles mères” s’exclame Pauline à Jérôme. Sous l’objectif masculin, les femmes sont scrutées dans leurs moindres faiblesses, érigeant la mélancolie comme un critère de beauté féminine. A ce male gaze morose, Agnès Varda répond par L’Une Chante, L’Autre Pas et pose un regard féminin joyeux sur une amitié qui traverse le temps. 

1976, Agnès Varda compose une équipe paritaire pour filmer quinze ans de lutte féministe, et prône l’action avant la revendication. Derrière l’amitié indéfectible de Suzanne et Pauline, L’Une Chante, L’Autre Pas offre un récit optimiste sur la sororité, qu’il érige comme un véritable pilier des combats militants. Près de 45 ans plus tard, le long-métrage d’Agnès Varda résonne avec toujours autant d’actualité. Les combats pour la parité au sein du cinéma, le droit à l’avortement et la liberté à disposer de son propre corps sont autant d’urgences pas encore résolues. 

Féministe comme ma mère

Agnès Varda croise devant son objectif deux parcours de femmes opposées, et pourtant unies par le même combat. Pauline, “Pomme”, quitte le foyer familial, éprise de liberté et se rêvant chanteuse; Suzanne cherche à s’échapper de la misère, avec ses deux enfants pour leur offrir une vie meilleure. L’Une Chante, L’Autre Pas est un récit d’apprentissage à deux visages, qui s’épanche tour à tour sur la vie de l’une et de l’autre, toujours nourri par une sororité qui résiste au temps et aux lieux. Un récit elliptique, à travers les correspondances des deux amies, qui retrace en même temps les évolutions de toute la société. 

Loin de toute moralisation, Agnès Varda retranscrit avec exaltation les combats féministes qui ont marqué les années 60-70, et qui accompagnent la construction de ses deux héroïnes. A travers le joyeux musical de Pomme qui chante avec amour et humour la féminité, ou le travail plus classique, mais essentiel de Suzanne au Planning Familial, L’Une Chante, L’Autre Pas ouvre les possibles : il n’y a pas une mais plusieurs féminités, comme il y autant de manière de militer. Derrière toute la liberté de sa mise en scène, imprégnée par le ton libertaire des mouvements hippies, Agnès Varda reconstitue avec une précision documentaire le procès de Bobigny, véritable tournant aussi bien scénaristique que militant. 

Avec L’Une Chante, L’Autre Pas, Agnès Varda redonne de la vitalité au récit féminin qui s’incarne à travers une sororité inter-générationnelle, et livre un témoignage essentiel et poétique des mouvements féministes. Dans son émouvante séquence finale, miroir inversé de son ouverture, la caméra balaye avec plénitude des femmes multiples au bord de l’eau, jusqu’à se figer sur Marie, la fille de Suzanne, 17 ans elle aussi. Interprétée par Rosalie Varda, la symbolique n’en est que plus forte. Si la lutte a été difficile pour les mères, elle en sera de même pour la fille : avec la féminité se transmet le combat féministe. Une transmission de mère en fille, de femmes en femmes, de cinéaste en spectatrices, aussi grave et essentielle qu’elle est pétrie d’espoirs et de victoires.


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 SÉANCES BUISSONNIÈRES



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