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KOKON

Un de ces étés caniculaires où l’on grandit si vite : premiers amours et premiers déboires, Nora cherche sa voie dans le Berlin populaire de Kreuzberg, entre une mère absente et une grande sœur protectrice. Mais du haut de ses 14 ans, Nora se moque des injonctions sociales, de genre et des modèles instagramables : elle veut vivre, briser son cocon et prendre son envol.

Critique du film

On peut reconnaître aux cinéastes allemandes de savoir parler d’amour queer et de renaissance. Après le très joli Seule la joie l’an dernier d’Henrika Kull, réalisatrice expérimentée, qui s’attaquait au sujet d’une relation lesbienne dans une maison close, c’est au tour de Leonie Krippendorff de livrer avec Kokon les prémisses d’une histoire d’amour entre femmes, cette fois ancrée dans le monde adolescent.

Nora est une jeune fille timide qui vit principalement à travers sa grande sœur, l’extravertie et séduisante Jule, et traîne dans le sillage de la vie sociale de cette dernière. Cachée derrière le rideau d’une frange épaisse, elle élève des chenilles dans leur chambre et semble exister principalement à l’intérieur d’elle-même. Tandis que Jule tempête et crie, Nora observe, consciente peut-être que son temps n’est pas encore venu. Et comme toutes les jeunes femmes de 14 ans, il lui faudra un été entier -et la rencontre de Romy, très différente de tout ce qu’elle connaît- pour que sa vie démarre enfin, tandis que le cadre du film s’élargit progressivement, à l’image de ses horizons.

Kokon
Leonie Krippendorff s’empare des codes du « coming of age » pour livrer un film solaire et émouvant, qui s’attaque sans tabous aux questions des premières fois féminines. Premières règles, premières fêtes, premiers émois ; le spectateur suit le parcours de Nora, accompagnée par la caméra bienveillante de la réalisatrice, et éprouve avec elle ses peines et ses joies. En filmant les interactions des lycéens entre eux, Leonie Krippendorff atteste de sa bonne compréhension des rouages parfois cruels de l’adolescence et porte sur cette période compliquée un regard à la fois lucide et tendre. Jule, en parfaite grande sœur tyrannique, n’est jamais méchante très longtemps et redevient une petite fille en un battement de cil.

Encadré par une narration façon story Snapchat et la métaphore assez évidente mais très jolie de la chenille qui devient papillon, Kokon réussit le pari d’aborder des sujets encore assez peu représentés au cinéma (la difficulté de mettre un tampon, la masturbation féminine, le coming-out – sur fond de débats culturels et sociaux – une jeune femme de seize ans peut-elle élever un bébé ?), sans jamais tomber dans la caricature ou le voyeurisme. Les corps féminins se libèrent et s’aiment avec une joie de vivre qui fait plaisir à voir ; à des kilomètres des premières fois lesbiennes françaises mises en scène par les hommes, Kokon atteste de la vitalité et de l’avant-gardisme du cinéma queer berlinois mais rappelle aussi l’importance de donner la parole à des cinéastes concernées pour porter ce types de récits.

Bande-annonce

5 avril 2023De Leonie Krippendorff, avec Lena Urzendowsky, Jella Haase et Lena Klinke.




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