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JUDO

Autrefois champion mythique de judo, Sze-To a depuis longtemps abandonné le monde du sport de manière inexplicable. Criblé de dettes, il s’est désormais bâti une triste réputation d’alcoolique sans aucun avenir. Les seuls à croire encore en lui sont Tony, passionné de judo et bien décidé à affronter l’ex-champion et Mona, apprentie chanteuse qui rêve de percer… Sze-To retrouve alors l’envie de se battre. Mais c’est en donnant un nouveau sens à sa vie qu’il acceptera, enfin, de remonter dans l’arène…

Critique du film

En 1943, Akira Kurosawa réalisa son premier long-métrage : La Légende du grand judo, film qui marqua les esprits de beaucoup de spectateurs au fil des décennies qui suivirent. Certains d’entre eux devinrent eux-mêmes cinéastes. Johnnie To en fait partie, même s’il reconnaît dans un entretien qu’on peut voir en supplément de l’édition vidéo de Judo, qu’il ne commença à apprécier à leur juste valeur les films de l’Empereur que plus tard, lorsqu’il acquit une certaine maturité. Car le cinéma de Kurosawa, empreint d’humanisme et de sagesse,  parlait souvent de courage et d’héroïsme, mais avec nuances, sans occulter les côtés sombres ou les fragilités de ses personnages. (C’est même cette exigence de vérité qui le fit se brouiller avec Toshiro Mifune sur le tournage de Barberousse).

Cette vision non stéréotypée de l’héroïsme et ce refus d’un manichéisme figurent aussi dans ce film de Johnnie To, qui se veut un hommage à Akira Kurosawa et à sa Légende du grand judo. Et cet hommage n’est nullement superficiel puisque Johnnie To offre avec Judo un film très fidèle à l’esprit et aux thèmes du maître : une intransigeance dans le fond, mais aussi dans la forme, beaucoup d’humour et d’ironie – la facilité avec laquelle nos trois amis roulent des gangsters aguerris – et ce mélange détonnant d’émotion et d’action – à la croisée des genres entre le mélodrame, la comédie romantique et les films d’arts martiaux. 

On compte beaucoup de films sur les arts martiaux, tous plus réussis et mouvementés les uns que les autres. Le judo n’est pas l’art martial le plus représenté au cinéma, car pas forcément le plus spectaculaire à priori. Raison de plus pour découvrir ce film de Johnnie To, réalisé en 2004 et projeté  au Festival de Venise, mais jamais sorti en France avant que Carlotta Films ne se charge de le proposer sur sa plateforme VOD en 2020 et, maintenant à la vente en vidéo physique dans une restauration 4K splendide, qui restitue à merveille les ambiances majoritairement nocturnes de cette histoire de déchéance et de rédemption. 

Judo Johnnie To

Dignité et rage de vaincre

L’un des premiers enseignements du judo est l’Ukemi-Waza ou art de la chute. Et il est ici beaucoup question de tomber et de se relever, inlassablement, sans jamais perdre l’espoir et la pugnacité. Sze-To, ancien champion de judo qui s’est jadis défilé et qui a sombré dans des addictions (alcool et jeu) va être confronté à ses angoisses et à ses défaillances. Poussé dans ses retranchements par Tony et Mona, Sze-To va progressivement retrouver dignité et combattivité.

Cette redécouverte de l’estime de soi passera également par deux scènes très fortes et fondatrices dans son cheminement : celle où, pour sauver Mona, il prend le risque de se faire sévèrement rosser et celle où il inflige une correction à Tony pour lui faire passer l’envie de mentir. Il s’agit bien de retrouver sa dignité et la rage de vaincre. Mona et Tony, dans leurs efforts, la première pour devenir chanteuse, le second pour se mesurer à d’autres judokas, apprendront aussi que l’effort constitue parfois une récompense plus grande que la victoire.

Le film offre bien évidemment de très belles séquences d’action, superbement chorégraphiées, comme cet affrontement général qui commence dans un night club et se poursuit dans la rue, véritable ballet martial. Ou l’affrontement final dans les hautes herbes, sans témoin, sans spectateur et donc sans autre gloire que le fait de savoir ce qu’on vaut réellement et ce qu’on a finalement retrouvé, qu’on croyait avoir perdu à jamais : l’honneur, l’amour de l’art et le combat pour la vie.

Et quand le film s’achève sur un générique qui dédie le film au « plus grand des cinéastes, Akira Kurosawa » et que retentit la magnifique chanson « Feng Di Dji Djie » interprétée par Paula Tsui, on sait alors qu’on a vu un des très grands films de Johnnie To. 


Judo est disponible en DVD, Blu-ray et Blu-Ray collector digipack à partir du 27 janvier, accompagné des suppléments suivants : Entretien avec Johnnie To (40 minutes) / Making-of du film (11 minutes) / Bande-annonce originale

PENDANT LE CONFINEMENT / LE COUVRE-FEU, DANS LES SÉANCES BUISSONNIÈRES, UN MEMBRE DE L’ÉQUIPE VOUS RECOMMANDE UN FILM (OU UNE SÉRIE) DISPONIBLE ACTUELLEMENT EN STREAMING LÉGAL, REPLAY OU EN VIDÉO.



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