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IMPITOYABLE

Kansas 1880. William Munny, redoutable hors-la-loi reconverti dans l’élevage va, à la demande d’un jeune tueur, reprendre du service pour venger une prostituée défigurée par un cow-boy sadique.

Sans pitié

En 1880, dans le Wyoming, une prostituée se fait lâchement défigurer et mutiler par des clients ivres d’alcool et de rage. Le shérif du comté, Little Bill, se contente de mettre à l’amende les coupables de cette violente agression. Il les somme de donner quelques chevaux au patron du bordel pour le dédommager du manque à gagner. Les autres filles, ulcérées de l’impunité des soûlards; décident alors de se cotiser pour payer un tueur. Une récompense de mille dollars est offerte à qui punira les coupables.

Un ancien tueur reconverti dans l’élevage de cochons depuis 10 ans et devenu étrangement bigot, William Munny, décide de tenter sa chance pour s’offrir un nouveau départ. Il fait alors équipe avec Ned, une ancienne connaissance et un nouveau venu le Kid de Schofield.

Sorti en 1992, Impitoyable est une démythification du western paroxystique par la violence des situations, le nihilisme de ses personnages et l’absence quasi totale d’héroïsme ou de lyrisme. Les hommes qui se font tuer sont souvent désarmés ou tués par surprise. La pitié ne semble pas exister. Il n’y a pas de duels, plutôt des exécutions. Ce film délivre une vision très sombre de l’humanité à travers des personnages masculins qui, pour la plupart, n’ont ni honneur, ni courage, ni vraies valeurs, mais qui sont menteurs, vantards, lâches et cupides. Et tous semblent corrompus dès la naissance. À la prostituée qui lui reproche d’avoir frappé un homme innocent, Little Bill lui rétorque « Innocent de quoi ? »

La loi du plus fort

Little Bill, le shérif, ne semble pas très préoccupé par sa fonction, le journaliste est prêt à suivre celui qui frappe le plus fort (il abandonne English Bob, le tueur interprété par Richard Harris) et les tueurs se lancent dans l’aventure plus pour toucher la prime de mille dollars que pour faire justice. Seules semblent trouver grâce aux yeux de Clint Eastwood les personnages féminins du film, à savoir les prostituées.

Les films de Clint Eastwood ont souvent contredit les préjugés qu’une partie du public ou de la presse pouvaient avoir de lui. Il fait souvent preuve d’une sensibilité inattendue et offre des personnages de femmes très intéressants. Dans Impitoyable, il est question de femmes maltraitées, qui ne valent pas mieux, aux yeux des hommes, que du bétail ou que l’argent que leurs passes rapportent à leur proxénète. Mais qui dans les faits font preuve de solidarité et ont soif de justice.

Munny, le tueur joué par Eastwood est torturé. Il est devenu bigot et abstinent concernant le sexe et l’alcool. Il se décide à repartir à l’aventure pour la somme de mille dollars, mais ses motivations vont évoluer. Au fur et à mesure qu’il approche du but, il est hanté par des visions du passé et se trouve confronté à ses vieux démons : l’alcool et la violence. Cette dernière semble d’ailleurs être une malédiction, une fatalité à laquelle il ne peut échapper. Et lorsque Munny décide de venger son ami et donc, d’aller au-delà de son but initial, il retombe dans l’alcool en même temps que dans la violence la plus extrême. ll y a presqu’une dimension fantastique dans les scènes finales car Munny semble devenir invincible (il affronte dans le saloon plusieurs tireurs qui le ratent) et devient une sorte de tueur de l’apocalypse.

Impitoyable Clint Eastwood
Débutant et se clôturant par des images superbes de crépuscule, avec une musique très douce de Lennie Niehaus, on pourrait presque prendre le film pour un cauchemar. Après le générique de fin, on découvre que le film est dédié à Sergio et Don. Clint Eastwood avait souvent reconnu sa dette envers Don Siegel dans son apprentissage de la mise-en-scène, lui offrant même un petit rôle dans sa première réalisation Un frisson dans la nuit (Play Misty for me). Il a plus rarement cité Sergio Leone et plus tardivement.  

Entre classicisme et singularité

Impitoyable a remporté 4 Oscars en 1993, largement mérités (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur second rôle pour Gene Hackman et meilleur montage pour Joel Cox). Il fait partie des plus grands films de Clint Eastwood, tant formellement que dans les thèmes abordés. La photographie de Jack N. Green est remarquable avec beaucoup de scènes nocturnes magnifiquement éclairées et l’utilisation du clair obscur. Et le format large 2 :35 est au service des paysages mais aussi d’une mise en scène splendide.

Il s’agit d’un film-somme. Eastwood, sans se répéter, brasse des thèmes et des images qui lui sont chers ou qui ont marqué l’histoire du western. Avec cette oeuvre, il réussit le croisement entre le western classique de John Ford et celui de Sergio Leone ou de Sam Peckinpah tout en gardant sa singularité.


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