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FREAKS OUT

Rome, 1943, sous occupation nazie, la Ville éternelle accueille le cirque où travaillent Matilde, Cencio, Fulvio et Mario comme phénomènes de foire. Israel, le propriétaire du cirque et figure paternelle de cette petite famille, tente d’organiser leur fuite vers l’Amérique, mais il disparaît. Privés de foyer et de protection, dans une société où ils n’ont plus leur place, les quatre « Freaks » vont tenter de survivre dans un monde en guerre…

Critique du film

Une jeune fille électrique, un homme-loup à la force surhumaine, un punk qui commande aux insectes, un clown magnétique et un grand méchant à deux fois six doigts qui voit dans le futur. Freaks Out c’est la galerie des anormaux de Freaks (Tod Browning, 1932) égarée dans le Jojo Rabbit de Taika Waititi.

Originaux et attachants, les Freaks restent peu définis. On se rend vite compte que ce n’est pas tant leurs qualités et caractères qui feront avancer l’intrigue, mais plutôt un implacable scénario, qui les fera d’ailleurs se séparer et se recroiser à l’envi. Gabriele Mainetti se concentre aussi sur l’ambiance et les effets visuels. Nombreux et impressionnants, plutôt maîtrisés, ils donnent à l’univers du film un côté imprévisible et irréel. Il devient foutraque assumé, lorsque que la mascotte clown du Zirkus Berlin se pare d’une moustache format brosse à dents. Le film reste très dur et très graphique. Malgré les « pouvoirs » dont ils ne disent jamais le nom, lorsque nos anormaux se battent, c’est toujours la Seconde Guerre mondiale. Leurs adversaires utilisent des armes lourdes et des explosifs… difficile pour Cencio de rivaliser avec ses insectes.

Freaks out
« L’anormal » qui sort du lot joue en fait dans ce camp d’en face. Franz. Le don de prescience et deux fois six doigts pour jouer au piano des morceaux entendus dans ses songes. Et impressionner le gratin nazi avec sa version instrumentale de Creep glanée dans le futur.
Franz Rogowski excelle d’étrangeté dans son jeu. Son personnage amène par ailleurs une réflexion singulière sur la monstruosité. Il ne fait pas que chasser des monstres puisqu’il en est lui-même un : il reste persuadé que les monstres (il s’agit seulement de trouver les bons) pourront sauver le Reich. Mais aspire également à la normalité : bête de foire pour ses talents musicaux, il préfèrerait être banal – à savoir, haut dignitaire nazi. Franz se compare enfin à Cassandre puisque chez les nazis, voir l’avenir ne sert à rien. Surtout lorsque l’on alerte sur le suicide d’Hitler et la chute d’un Reich supposément millénaire.

Il y a justement quelque chose d’ambigu dans le film de Gabriele Mainetti. Non pas qu’il soit complaisant ou qu’il omette de poser les bonnes questions : plusieurs scènes évoquent sans détour le traitement réel de ceux que le Troisième Reich jugeait anormaux : personnes en situation de handicap, « déviants », etc. Pourtant, on retrouve dans la démesure finale un côté Suicide Squad deuxième du nom. Un grandiose foncièrement malpoli, brutal, explosif. Et c’est peut-être ce qu’il manque à Freaks Out, l’envie de s’éloigner de la structure classique d’un film du genre. Parce que ce que propose Mainetti, même revisité, même sur le ton de l’humour et même paré des plus beaux atours de cirque (nazi) que l’on puisse imaginer, c’est le final de n’importe quel blockbuster.

Bande-annonce

30 mars 2022 – De Gabriele Mainetti, avec Franz Rogowski, Claudio Santamaria et Pietro Castellitto.




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