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FOLLOWING

Un romancier en herbe est poursuivi par une obsession. Il file des inconnus jusqu’au jour ou l’un deux, cambrioleur professionnel, l’entraîne dans ses combines…

À l’origine des fantasmes

Bill est commun. Bill aime la foule, s’immiscer dans la normalité. Il aimerait être écrivain, raconter des histoires, dresser des portraits… Pour se faire, Bill suit des gens, aime épier l’inconnu.e et observer le moindre geste, en déterminer un comportement, une émotion, une personnalité. Bill n’est pas sociopathe, ni un psychopathe, d’ailleurs – plutôt un fin observateur du genre humain, pour le bien de sa propre passion, l’écriture. Mais son quotidien de « voyeur » est perturbé lorsque l’une de ses enquêtes se retourne contre lui. Bill rencontre le mystérieux Cobb, qui se vend cambrioleur de haut niveau. Ce dernier le prend par la main dans ses affaires toutes plus louches les unes que les autres… Et c’est ainsi, à l’instar du film dont il est question ici, Following (Le Suiveur, en français, un peu moins sexy), que Christopher Nolan nous embarque lui-même dans son œuvre – pilier, schéma plus ou moins abouti d’une carrière qui ne fera que gonfler par la suite, jusqu’à la grande consécration (la trilogie The Dark Knight).

Ce qu’il y a de si particulier, dans Following, ce n’est ni son caractère rétrograde (le noir et blanc, l’économie de moyens, de décors, de dialogues… de tout en fait), ni son parti pris de durée (1h00, pas plus), mais tout ce qu’il a engendré. Following est le premier long métrage d’un auteur anglais très vite intégré à l’industrie à l’américaine, à l’univers sauvage d’Hollywood – mais qui a su y instaurer un cinéma unique, jamais linéaire, qui aime tanguer entre les réalités, les souvenirs et les rêves. 

(Dé)construction(s)

Nolan, avant même d’avoir ne serait-ce que penser au projet Inception (dont le personnage principal s’appelle aussi Cobb, étrangement), ou encore la course contre la montre Interstellar, se fascinait déjà par la déconstruction du récit. Following, son film le plus succinct à ce jour, n’est pas non plus son plus accessible, loin de là. La complexité du scénario, point fort du réalisateur, peut remercier une chronologie toujours aussi travaillée, qui ne prend sens qu’à la fin du film. Même en 1999, Nolan incitait déjà le spectateur à rester jusqu’à la fin de la séance, pour avoir la satisfaction personnelle de remettre un puzzle bien en place. 

Ainsi, Following, qui fêtera en décembre prochain ses 20 ans de bons et loyaux services, demeure une œuvre qui s’apprécie « à posteriori » du reste de la carrière de son auteur. Ce n’est que deux décennies plus tard que ce film prendra peut-être tout son sens, comme un point de départ « à tâtons », peut-être timide, des films immenses qui lui succéderont. Cependant, réside en ces images au grain contrasté une philosophie qui ne peut que convoquer l’admiration : un polar moulé dans le genre du film noir, déroutant et intriguant, sans qui ni Memento (premier véritable succès de Nolan) ni Inception n’auraient sûrement pas pu voir le jour. Rares sont les premiers films à pouvoir autant annoncer les préceptes d’une carrière aussi impressionnantes que celle de Nolan.


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