Domingo critique

DOMINGO

En 2003, le Brésil connaît une révolution : l’élection du président Lula. Ce renversement est perçu depuis une réunion de famille chez la haute-bourgeoisie, à l’image du pays.

Una vez, nada mas.

Il suffit que de quelques plans, d’une lumière et de la mise en scène théâtrale de Fellipe Barbosa et Clara Linhart pour en être certain : Domingo est le film de sa métaphore. Laura, matriarche d’une de ces familles de l’aristocratie qui ne possède plus que ses particules, ne contrôle plus vraiment rien en son domaine. A l’occasion d’une repas dominical, la famille, éclatée, se réunit pour ce qui a tout l’air d’une dernière de ces valses hypocrites que les sociétés civilisées nomment repas de famille. Une visite plein Sud, à la marge de ce Brésil renversé par l’élection du président Lula, loin de Rio, des favelas, des plages et des jungles, bref, loin des images traditionnelles du pays. Des liens du sang aux cousins, amants et domestiques, chaque personnage joue le rôle du segment social qu’il représente : une large portion du film s’affairant précisément à faire relier au spectateur l’un avec l’autre, rien ne sert ici à faire la liste exhaustive des Brésils dépeints.

Le cinéma de Domingo, contrairement au lieu où son action se déroule (on pourrait presque parler de scénographie, parfois), est lui beaucoup plus convenu : tout ce qui est sous le soleil, propice aux grands rassemblements de personnages, est tourné en caméra fixe. L’occasion de longs plans où chacun, grognant et marmonnant assis sur son cul, est la parfaite démonstration de son propre immobilisme. Peut-on vraiment parler là de plan-séquence, tant ce choix de mise en scène est empreint d’évidence, certes cohérente, mais indéniablement facile ? On en préfère largement ces séquences en intérieur, où chacun à son tour prend puis perd  le premier plan, au sens propre et figuré, et où les jeux de profondeur font mieux discerner les enjeux cachés de chacun, et donc, les tensions sociales qui régissent une société toute entière.

Branché sur courant alternatif, Domingo possède les fardeaux, mais également les atouts de son procédé métaphorique : le plus judicieux d’entre eux étant de savoir intéresser et impliquer le spectateur, qu’importe sa connaissance du Brésil et a fortiori, des enjeux politiques de cette époque, et donc de se permettre de ne pas être qu’un film prêchant des convaincus. Ajoutez à cela quelques pointes rares mais bien amenées de comédie et une propension tout à fait remarquable à filmer des orgasmes nuls et du sexe bande-mou, et voilà qui en dit long sur un exosquelette social dont on ne savait rien avant, et qu’on regarde avec une mélange de tendresse et de fatalisme, après.

La fiche
domingo affiche

DOMINGO
Réalisé par Fellipe Barbosa, Clara Linhart
Avec Camila Morgado, Ítala Nandi…
Brésil – Drame

Sortie : 10 octobre 2018
Durée : 94 min
 




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