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COME PLAY

Oliver est un jeune garçon solitaire qui se sent différent des autres et cherche du réconfort dans son téléphone portable et sa tablette. Mais une mystérieuse créature va utiliser les technologies contre lui afin de s’introduire dans notre monde. Les parents d’Oliver vont devoir se battre pour sauver leur fils du monstre qui se trouve derrière l’écran.

Critique du film

Avec plus d’un million de vues sur la toile, nul doute que le court-métrage d’horreur Larry a fait son petit effet auprès des internautes en 2017. Et il n’aura pas fallu attendre longtemps avant que des producteurs sentent le bon filon et s’emparent du petit buzz en proposant au monteur/réalisateur Jacob Chase (auteur du dit court-métrage) de transformer son essai en l’adaptant pour le grand écran. Après tout, l’opération s’était déjà avérée payante avec Lights Out (tout du moins en termes de recettes au Box-office). Sorti en fin d’année dernière outre Atlantique, le film débarque finalement en France en Blu-ray et DVD. Alors, que vaut ce conte horrifique, soutenu par rien de moins que Steven Spielberg, qui le produit via sa société Amblin Partners ? 

Horreur au long court

Premier défi, et pas des moindres pour Jacob Chase : construire, autour de son concept initial, une trame narrative compatible à un film d’une heure trente. Car si le format court original requérait une épure totale (et indispensable) du dispositif narratif, l’enjeu est évidemment tout autre pour un film de cinéma. Chase doit dépasser le  »simple » exercice de style pour livrer un film qui raconte quelque chose via son intrigue et sa mise en scène. Le réalisateur choisit donc d’articuler son récit autour d’une famille dysfonctionnelle. L’enfant, Oliver, présentant des troubles autistiques qui l’isolent socialement (de ses parents, de ses camarades de classe…), se réfugie dans son téléphone et sa tablette pour y trouver du réconfort (notamment dans les dessins animés qu’il regarde). Et c’est à travers ces écrans technologiques que va se manifester Larry, une entité horrifique qui souffre visiblement d’une grande solitude puisqu’elle cherche à s’immiscer dans le monde humain pour y trouver un ami en la personne d’Oliver.

À l’image du court métrage originel, il conviendra de rappeler d’entrée de jeu que Jacob Chase ne cherche jamais à réinventer le genre dans lequel il évolue. Doté d’une grammaire visuelle de l’épouvante aussi éculée qu’efficace, le film avance sur des rails solides, bien que très/trop familiers pour totalement convaincre. Jeu sur les ombres, jumpscares et suggestion du hors champ : aucun des artifices du cinéma d’horreur mainstream ne manque à l’appel. Et si le film suit un chemin trop balisé pour réellement surprendre son spectateur, il ne manque malgré tout jamais de soin et de sincérité dans son exécution. Jacob Chase connaît ses classiques et sait souvent en tirer le meilleur, n’hésitant pas par exemple à laisser certains plans durer plus longtemps que la plupart des productions du genre, et ainsi habilement générer la tension horrifique. 

Come Play film

Viens jouer… au jeu des 7 différences

Malheureusement, et malgré toute l’attention portée à ces effets, le film peine à trouver sa personnalité, notamment parce qu’il convoque trop d’œuvres récentes avec lesquelles la comparaison lui est la plupart du temps défavorable. On peut citer Mama, d’Andrès Muschietti, dans sa représentation d’une créature, longtemps suggérée par la mise en scène, et qui cherche à s’emparer d’un enfant avec lequel elle souhaite tisser un lien (le climax du film fonctionne d’ailleurs sur les mêmes ressorts émotionnels dans les deux films), mais c’est surtout Mr Babadook, qui vient directement à l’esprit du cinéphile, tant les thématiques esquissées dans Come Play sont similaires à celles posées par le premier film de Jennifer Kent.

Mais là où l’oeuvre australienne se servait de son postulat horrifique pour interroger les formes de toxicité qui existent dans le rapport mère/fils de ses personnages, Come Play adopte un traitement beaucoup plus timoré, ne suggérant que sporadiquement l’ambiguïté des sentiments qui animent cette mère qui ne parvient pas à communiquer avec son fils. Et à ne jamais aborder frontalement son sujet, le film finit par passer complètement à côté de la GRANDE scène émotionnelle qui voit se confronter ses deux personnages, le trouble intérieur maternel ayant trop été mis de côté précédemment, malgré le bel investissement Gillian Jacobs pour donner corps à son personnage.

La technologie, c’est mal !

À l’instar du développement réservé à ses personnages, le film se montre également maladroit lorsqu’il tente de poser un regard sur la technologie. Non pas qu’une critique d’un monde en pleine déshumanisation soit mal en soit. Elle est même par instant plutôt efficace lorsque le réalisateur l’utilise pour susciter la peur. Mais vers la fin du deuxième acte, le discours est asséné avec la subtilité d’un 35 tonnes, tant et si bien qu’on a plus l’impression d’être face à la rengaine d’un vieux réac que d’un cinéaste qui souhaite à faire réfléchir son spectateur sur les dérives du monde moderne. Tout juste le film se rattrape dans ses dernières secondes, offrant à la fois une note de nuance, certes bien maigre par rapport à toute la morale un peu simpliste déblatérée précédemment, mais également un dernier plan plutôt émouvant , concluant l’histoire avec une douceur bien sentie. 

Reste au final un film un peu bancal mais qui laisse entrevoir le talent d’un cinéaste encore trop recroquevillé sur ses références et qu’on aimerait découvrir sur un projet moins inscrit dans les codes hollywoodiens. Le film de la maturité en somme…


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