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CHRONIQUE D’UNE LIAISON PASSAGÈRE

Une mère célibataire et un homme marié deviennent amants. Engagés à ne se voir que pour le plaisir et à n’éprouver aucun sentiment amoureux, ils sont de plus en plus surpris par leur complicité…

Critique du film

Fin février, Paris. À quelques jours du printemps, un homme marié (Simon) retrouve une quadragénaire célibataire (Charlotte) dans un bar de quartier. Les échanges se font sans détour. Charlotte verbalise rapidement son attirance, allant même jusqu’à rassurer spontanément le futur mari infidèle : elle n’a aucune envie de chambouler sa vie de famille et recherche avant tout de la simplicité. Une liaison sans attaches et sans embarras. Désacraliser le sexe. Lui freine des quatre fers. Par culpabilité ? Même pas. Il concède déjà s’adonner à ce travers la majeure partie du temps et n’y verrait là qu’un énième motif de son existence. Ses précautions apparentes ne seraient finalement qu’une manière de réfréner ses élans du coeur.

Entreprenante, Charlotte l’invite chez elle pour bavarder devant une infusion et, peut-être, faire l’amour. C’est ainsi que débute leur liaison passagère. Quelques entrevues précocement abrégées laissent imaginer qu’il n’y aura pas de nouveau partage charnel. L’équinoxe passée, les deux amants trouvent finalement refuge dans l’appartement inoccupé d’un ami dans le secret. La complicité s’étoffe et, avec elle, l’attachement. La légèreté revendiquée est-elle durable, avant que l’imminence des sentiments, de l’affection et de la jalousie étouffée, ne viennent s’en mêler ?

La nature humaine

Simon se cache. Il a peur d’être pris sur le fait, par une connaissance. Il n’assume pas cette liaison qui, pourtant, lui procure tout ce dont il a toujours rêvé. Simon masque aussi sa gêne derrière un flot de paroles et de convenances. Il étouffe ses craintes et certains désirs qu’il n’ose assumer. Comment s’arrange-t-on avec sa conscience ? La question revient, après Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait, où Vincent Macaigne campait (déjà) un mari infidèle laissant partir cette maitresse qu’il aime ardemment.

Chronique d'une liaison passagère

« Tout est une dernière fois, les choses changent en permanence, les êtres sont en constante mutation » lui fait remarquer Charlotte, bien consciente que cela ne pourra pas durer. Alors, ils profitent de cette liaison « passagère » en se le répétant continuellement, comme pour exorciser cette fin inévitable et masquer une envie de faire durer le présent. À force d’élégance(s), de non-dits, les sentiments demeurent étouffés, et l’irruption d’une tierce personne, surprise improbable, vient rompre le fragile équilibre de cette relation. « Nous nous aimions, le temps d’une chanson » résonne à de nombreuses reprises, tel un leitmotiv. Comme pour rappeler la fugacité de leur histoire d’amour qui ne dit jamais son nom, comme pour les inciter, nous inciter, à réclamer un rappel.

« Dans les films que j’écris, le sentiment varie avec le temps, le sentiment est malade, mais la raison est malléable aussi. C’est ce mouvement qui m’intéresse, ce qui se passe au cours du temps » nous confiait l’an dernier le cinéaste. Pour son onzième long-métrage, Chronique d’une liaison passagère, Emmanuel Mouret signe une nouvelle variation du désordre amoureux et de la dualité entre le cérébral et le sentiment, avec toujours ce mélange de fantaisie et d’élégance, de magie et de cruauté. Vincent Macaigne y est plus émouvant que jamais, maintenant sous cloche ses élans pour les faire jaillir dans ses regards, ses gestes et sa touchante maladresse.

Bande-annonce

14 septembre 2022De Emmanuel Mouret, avec Sandrine Kiberlain, Vincent Macaigne


Cannes 2022Première




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