CHER EVAN HANSEN
Critique du film
Adaptation cinématographique de la comédie musicale du même nom jouée à Broadway de 2015 à 2017 et écrite par Benj Pasek, Justin Paul et Steven Levenson, Cher Evan Hansen est porté à l’écran par Stephen Chbosky avec le comédien Ben Platt retrouvant le rôle-titre d’Evan Hansen, un adolescent qui souffre d’anxiété sociale depuis plusieurs années. Sa mère, soignante, tient à ce qu’il suive une thérapie. Dans le cadre de celle-ci, on lui assigne un travail introspectif : s’écrire des lettres pour se rappeler pourquoi « aujourd’hui sera une bonne journée ». Dans l’une d’elle, il se demande si quelqu’un remarquerait s’il venait à disparaître.
Cette lettre est malencontreusement lue par Connor, un autre élève de l’école particulièrement snobé par ses camarades en raison de son tempérament imprévisible. Ce dernier comprend mal l’intention derrière les mots d’Evan et s’imagine que la mention de sa sœur Zoe, pour laquelle Evan a un crush, est une énième provocation pour le déstabiliser. Lorsqu’il se donne la mort, la seule chose que retrouvent ses parents est cette note, qu’ils prennent pour une lettre de suicide, s’imaginant ainsi que Connor et Evan entretenaient un lien d’amitié qu’ils ne connaissaient pas. Craignant de briser davantage le cœur de sa famille, Evan est incapable de rétablir la vérité et finir par valider l’idée que lui et Connor étaient amis.
Bien qu’il soit plutôt compliqué d’approuver cette voie manipulatrice, le film réussit assez habilement à exposer les raisons qui le poussent à alimenter ce mensonge, après de vaines tentatives de révéler spontanément la vérité. Face à cette tragédie qu’est le suicide, chacun s’accroche à une illusion pour tenter de faire son deuil et de trouver du réconfort et du sens. Derrière le drame, Cher Evan Hansen explore assez justement les thèmes de la solitude et du suicide adolescent, tandis que certaines séquences chantées tentent de rendent plus poignants sans y parvenir complètement.
Si la narration s’en tire avec honneur dans le récit du mensonge d’Evan et de son cheminement vers la rédemption, le pan « comédie musicale » semble bien moins fonctionner à l’écran qu’il ne devait le faire sur scène, pas aidé par une mise en scène peu inspirée. Le versant mélodramatique fonctionne bien mieux car, si le tissu de mensonges qui se tisse progressivement a quelque chose de rebutant, le spectateur entre en empathie avec ce garçon pris à son propre piège par volonté de bien faire, d’abord, mais par espoir d’être enfin apprécié pour qui il est. Pourtant encouragé de façon indéfectible par sa propre mère (Julianne Moore), l’affection et le soutien qu’il reçoit de la famille de Connor deviennent naturellement une source d’ivresse pour celui qui a si souvent connu le rejet.
Dans cet exercice périlleux, plus que dans celui de l’adaptation d’une pièce musicale, le film s’en sort plutôt bien grâce à la sincérité du propos, à l’innocence sous-jacente de son protagoniste et la performance investie de ses comédiens, et notamment de Ben Platt à l’excellente Kaitlyn Dever (Unbelievable) en passant par Amandla Stenberg. Cher Evan Hansen ne réussit pas tout, mais son message a le mérite de passer.
Bande-annonce
12 janvier 2022 – Avec Ben Platt, Julianne Moore, Kaitlyn Dever, Amy Adams
