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CETTE MUSIQUE NE JOUE POUR PERSONNE

Dans une ville portuaire, des êtres isolés, habitués à la violence, vont soudain voir leurs vies bouleversées par le théâtre, la poésie et l’art. Et leurs quotidiens, transformés par l’amour…

CRITIQUE DU FILM

Tourné dans le Nord de la France, au bord de la mer, Cette musique ne joue pour personne entremêle plutôt habilement, par le biais d’un film choral à la très belle distribution, plusieurs intrigues où l’humour et la dérision le disputent à la tendresse. On y verra donc un groupe de dockers un peu borderline, dont le patron joué par François Damiens aimerait déclarer sa flamme à une jeune caissière au pull rose, interprétée par Constance Rousseau, des répétitions de théâtre assez savoureuses, des hommes de main partagés entre violence et bienveillance – en résumé, des hommes et des femmes qui cherchent ou trouvent inopinément un sens à leur vie ou une manière de transcender la banalité de leur vie, grâce à la poésie ou à l’art.

Samuel Benchétrit a co-écrit et co-dialogué ce film avec Gabor Rassov, homme de cinéma mais aussi de théâtre, théâtre dont il est souvent question dans ce film. Puisqu’on assiste entre autres à l’élaboration d’une comédie musicale mettant en scène la relation entre Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, cette dernière étant pour le spectacle jouée par une femme au foyer bègue et qui a beaucoup sacrifié – au sens fort du terme, on le découvrira bien assez tôt – à son rôle et à ce projet que beaucoup pourraient juger bancal. Cette femme c’est Vanessa Paradis dans un beau contre-emploi. Gustave Kervern, lunaire et décalé comme il sait si bien l’être en homme de main de François Damiens, aimerait bien récupérer une certaine somme d’argent, mais va s’intéresser à cette pièce de théâtre un peu particulière qui va l’entraîner peut-être plus loin qu’il ne le pensait.

Cette musique ne joue pour personne

Certaines dérives du théâtre sont gentiment moquées, mais jamais avec méchanceté. Le metteur-en-scène – Bruno Podalydès, drôle et attachant – s’il est parfois ridicule et sombre dans l’angélisme avec ses protégés, laisse éclater une bienveillance et un amour de l’art partagés par le professeur de poésie de François Damiens – Thierry Gimenez – amour de l’art qui est peut-être un amour de la vie, et de la rencontre avec l’autre. Bouli Lanners et Joey Star forment un très beau binôme, en durs se laissant attendrir par la fille de leur patron. Le premier avec ses incontrôlables accès de violence malgré son exemplaire du livre « Le Calme intérieur », toujours dans la poche. Le second en alter ego taiseux et porté à calmer le jeu quand son camarade s’emballe.

Ce nouveau long métrage de Samuel Benchétrit doit beaucoup à ses interprètes qui ont visiblement pris plaisir à jouer ensemble et à habiter cet univers décalé, tendre et cruel à la fois. Qu’il s’agisse de Valeria Bruni Tedeschi, femme blessée qui se raccroche à des poèmes qui ne lui sont pas destinés, Ramzy Bédia en messager ou Vincent Macaigne, dont on regrettera seulement que son histoire apparaisse comme un peu plaquée, comme dans un film à sketches. On aurait bien aimé le voir interagir avec les autres personnages de ce film. Citons aussi Jules Benchétrit en petite frappe qui se laissera peut-être lui aussi gagner par l’apaisement ou la jeune Raphaëlle Doyle, en adolescente qui craint que personne ne vienne à sa fête.

Cette musique ne joue pour personne offre aussi de très beaux plans sur la plage du nord de la France avec François Damiens face à l’horizon, de beaux portraits de personnages cabossés, parfois frappadingues mais bien vivants et distille à la fois mélancolie, humour et bonne humeur contagieuse.

Bande-annonce

29 septembre 2021De Samuel Benchetrit, avec François Damiens , Ramzy Bedia et Vanessa Paradis




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