ARYTHMIE
Katia et Oleg sont un couple d’urgentistes en Russie. Oleg est brillant, mais son métier l’absorbe. Confronté chaque jour à des cas difficiles, l’alcool l’aide à décompresser. Katia ne se retrouve plus dans cette relation. A l’hôpital, un nouveau directeur applique des réformes au service de la rentabilité. En réaction, Oleg s’affranchit de toute limite et l’équilibre du couple vacille plus encore.
Critique du film
Tourné en 2017 et sorti sur les écrans français en août 2018, Arythmie brasse plusieurs thèmes comme la réforme du système de santé en Russie, l’alcool et la violence, qui semblent omniprésents dans ce pays et les affres de la vie d’un couple de médecins passionnés par leur métier.
On y découvre une société où des fonctionnaires indisciplinés comme peut l’être Oleg – souvent pour la bonne cause – peuvent faire l’objet d’une amende ou d’une suspension de salaire. De même, le nouveau code de la santé entraîne de nouvelles procédures excessivement contraignantes, mettant en danger l’essence même de ce la profession d’urgentiste et les patients eux-mêmes : ainsi, la règle des 20 : 20 minutes maximum pour se rendre sur le lieu de l’intervention ; 20 minutes pour prendre en charge le malade et 20 cas par jour à traiter. Le tout en rendant compte en direct à des coordinatrices, avec le risque de se déconcentrer ou de recevoir des directives, plus rentables, mais moins humaines.
Cette nouvelle façon de travailler, qui coïncide avec l’arrivée du nouveau directeur de l’unité d’intervention va heurter Oleg, déjà profondément ébranlé par l’intention de divorcer de sa femme Katia. Celle-ci ne supportant plus l’alcoolisme de son mari.
Cas de conscience
Arythmie offre la description détaillée des failles d’un système, des dérives qui en découlent et des cas de conscience qui naissent chez ceux qui refusent de se résigner ou de brader leurs idéaux. Porté par le jeu remarquable d’Alexandre Yatsenko et d’Irina Gorbatcheva – tous deux ont remporté des prix d’interprétation – et marqué par une réalisation sobre, ce film ne s’appesantit jamais sur des scènes trop dures. Les passages relatifs aux interventions des urgentistes sont réalistes, sans jamais être racoleuses ou complaisantes. Et certaines notes d’humour viennent parfois désamorcer la tension. Notamment l’inventivité dont peut faire preuve Oleg quand il cherche à calmer une patiente hypocondriaque.
La crise que rencontrent Oleg et Katia dans leur relation fait l’objet d’un traitement sensible et Boris Khlebnikov arrive à trouver un équilibre entre ces scènes intimistes et les moments d’intervention des urgentistes. De même, la description de l’alcoolisme en Russie et de la violence qui en naît se fait sans forcer le trait. Durant près de deux heures, aucune longueur ne se fait sentir et l’intérêt ne faiblit jamais.
Instructif, mais aussi intense et touchant, Arythmie résonne encore plus fort dans le contexte actuel où les soignants sont soumis à la rude épreuve de l’épidémie qu’ils doivent affronter avec un manque de moyens criant.
