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ALL EYES OFF ME

Raconté en trois chapitres liés, le film suit une génération jeune et confiante. Danny est enceinte de Max. Elle veut profiter d’une fête pour le lui annoncer, mais n’y parvient pas. De son côté, Max explore les fantasmes sexuels de sa fiancée Avishag. Celle-ci se confie à Dror, qui la paye pour garder son chien. Entre le vieil homme et la jeune femme naît une intimité inattendue.

Critique du film

À l’origine de All eyes off me, il y a une envie de la réalisatrice Hadas Ben Aroya : raconter l’histoire d’une jeune femme insaisissable qui s’éprend d’un homme plus âgé. Une sorte de Lolita, inversée. Au lieu d’un homme âgé attiré par une jeune fille vierge, elle désirait suivre le parcours d’une jeune femme active sexuellement attirée par un homme qui n’a jamais eu de relation sexuelle. Il deviendrait ainsi sa nymphette, dans une maison bucolique en banlieue où il élève des abeilles. Mais ce pan narratif là n’intervient que dans son dernier tiers. Souhaitant donner au spectateur les clés du cheminement émotionnel de sa protagoniste, Avishag, elle décide de montrer le monde de celle-ci, qui repousse sans cesse les limites au point de ne plus ressentir grand chose.

Découpé en trois chapitres, le long-métrage s’ouvre sur une fête entre jeunes qui dansent sous les lumières multicolores, flirtent et consomment quelques substances licites ou non. Ce premier segment suit Danny, une jeune femme à la recherche d’un certain Max, dont elle vient de découvrir qu’elle est enceinte après une liaison passagère. Lorsqu’elle le retrouve, il est en train d’embrasser fougueusement une autre femme, ce qui la prive de la confidence qu’elle envisageait de lui faire. La jeune femme pour laquelle Max s’enflamme n’est autre qu’Avishag, l’héroïne du film. On les retrouve ainsi tous deux dans le second chapitre alors qu’ils se découvrent et tentent de réaliser les fantasmes sexuels de chacun. Tandis que Max lui confie qu’il est probablement bisexuel et ne masque plus ses sentiments nourris à son égard, Avishag lui raconte qu’elle aimerait qu’il la gifle et l’étrangle durant leurs ébats. D’abord dérouté par ces suggestions, Max semble finalement y prendre progressivement goût jusqu’à se lâcher un peu trop et la blesser au visage. Le spectateur devient alors témoin de ce dérapage qui met à mal la question du consentement en dépit de l’alchimie évidente entre les deux personnages.

All eyes off me

L’ultime segment du film nous conduit donc chez l’homme pour qui elle garde la chienne, où elle trouve finalement refuge lorsqu’il lui demande de garder son animal plus longuement que d’ordinaire. Un lien de complicité et de bienveillance naît entre eux, au gré des confessions. All eyes off me, qui invite littéralement à détourner le regard pour respecter la vie privée de ses personnages, parle avant tout d’intimité – tout en se montrant régulièrement très impudique, tant dans ce qui est dit que montré à l’écran. Pourtant, les plus beaux instants sont justement ceux où les protagonistes se retrouvent vulnérables devant autrui, confiant leurs attirances sexuelles, leurs souvenirs douloureux, ou laissant quelques larmes enfin s’échapper.

Fantasmes et désirs, intimité et vulnérabilité, All eyes off me profite des interactions authentiques entre ses personnages pour trouver de la justesse, de la spontanéité et de l’émotion. À travers ces trois chapitres, le second long métrage d’Hadas Ben Aroya dresse le portrait d’une génération d’Israéliens prêts à s’affranchir de toutes ses limites, persuadés de maitriser ces transgressions morales et physiques sans anticiper les conséquences de leurs actes. Avec cette question en filigrane du film : à quel point sont-ils véritablement libérés ? Sans chercher à apporter de réponse, la réalisatrice israélienne met en images les paradoxes d’une génération qui ne sait plus vraiment comment ressentir et se connecter.

Bande-annonce

8 juin 2022De Hadas Ben Aroya, avec Elisheva Weil, Leib Lev Lenin, Yoav Hait




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