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9 JOURS À RAQQA

Leila Mustapha, 30 ans, ingénieure en génie civil, trois fois major de sa promotion, est la jeune maire de Raqqa, l’ancienne capitale autoproclamée de l’état islamique en Syrie. Plongée dans un monde d’hommes, elle a pour mission de reconstruire sa ville en ruines après la guerre, de réconcilier et d’y instaurer la démocratie. Une mission hors normes. Une écrivaine française traverse l’Irak et la Syrie pour venir à sa rencontre. Dans cette ville encore dangereuse, elle a 9 jours pour vivre avec Leila et découvrir son histoire.

Critique du film

Journaliste et écrivaine, Marine de Tilly souhaitait rencontrer Leïla Mustapha afin de lui consacrer un ouvrage – paru en janvier 2020 aux éditions Stock : La Femme, la vie, la liberté – malgré la complexité et le danger que peut représenter un périple vers la Syrie. Informé de cette intention, le réalisateur Xavier de Lauzanne est alors entré en contact avec l’écrivaine afin de filmer cette rencontre. 

Syrienne, kurde, Leïla Mustapha, est Co-Présidente du Conseil Civil de Raqqa et œuvre avec courage et une volonté de dialogue à la reconstruction de sa ville, qui a été détruite à 80% par Daesh qui en avait fait la capitale autoproclamée de l’Etat Islamique de 2014 à 2017. Cette mission de faire renaître de ses cendres une ville meurtrie et à la population traumatisée passe par une collaboration entre les différentes tribus et ethnies présentes à Raqqa et un rôle des femmes prépondérant. La parité hommes femmes constitue un des fers de lance de Leïla Mustapha. 

Lors de ce documentaire, on suit cette femme, qui paraît très simple malgré l’ampleur de la tâche qui lui incombe, dans son quotidien. Une impression de force tranquille, de sérénité émane de sa personne. Ce qui frappe, c’est le fait que malgré tout ce que Leïla Mustapha a connu, elle reste une femme qui ne s’est pas durcie. Elle semble rester à l’écoute, bienveillante, constructive et portée sur le dialogue avec les autres. En tant que kurde, elle a connu le rejet, l’ostracisme. Cette expérience lui a insufflé détermination et lucidité mais ne lui a pas enlevé son sens de l’écoute et son désir de rester positive.

Vivre à Raqqa

Mais le danger reste bien réel. Leïla Mustapha, quand elle fait visiter à ses interlocuteurs français, certains lieux de Raqqa, précise qu’il ne faut pas rester trop longtemps sur place. Les images très impressionnantes d’une ville quasiment rasée laissent imaginer l’enfer qu’ont vécu les habitants de Raqqa. 

La reconstruction se fait avec une véritable volonté d’aller de l’avant. Il y a à nouveau des hôpitaux, des routes et des écoles. La place Naïm, autrefois surnommée rond-point de la mort s’appelle maintenant Place de la Liberté. La renaissance de sa ville, qui aurait pu paraître impossible,  semble être devenue la principale raison de vivre de Leïla Mustapha. 

9 jours à Raqqa est la première partie d’une trilogie : La Vie après Daesh en Syrie et en Irak. La deuxième partie, Radio Al-Salm, devrait sortir au début de l’année 2022 et sera axée sur l’unique radio libre du Kurdistan. Quant à la troisième partie, Mossoul Campus, prévue pour le printemps 2022, elle présentera un groupe d’étudiants qui ont fait de leur grande bibliothèque brûlée par Daech un  lieu d’échange et d’expression. Ce documentaire est également né de l’envie de Xavier de Lauzanne de casser les clichés sur la Syrie. La musique qui accompagne le film, signée Ibrahim Maalouf, constitue une partition envoûtante, parfois nostalgique, parfois inquiétante. 

Film sur l’espoir, les êtres de bonne volonté et l’envie de reconstruire, sans oublier l’indicible, 9 jours à Raqqa dresse un très beau portrait de femme déterminée et lucide mais à qui les épreuves n’ont pas retiré humanité et sensibilité. Ce documentaire, que le réalisateur ne considère pas comme un film sur la guerre mais sur une sortie de crise, suscite l’intérêt et le respect pour Leïla Mustapha, sans forcer le trait, en restant très factuel.  

Bande-annonce

8 septembre 2021De Xavier de Lauzanne




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