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BILAN 2021 | L’édito de la rédaction

En 2020, nous nous interrogions sur le bulletin de santé du cinéma, durement touché par la pandémie mondiale. Cette année, l’exploitation de films en salles françaises n’a pu exister qu’à moitié, avec une reprise mi-mai après plus de sept mois de fermeture qui semblèrent interminables. Dans cette période si particulière, les énergies se sont dirigées vers les nouveaux moyens de consommation de divertissement, à savoir internet et les plateformes, concentrant tout le cinéma dans le cadre privé. Si ce moyen de survie a constitué un terreau très important d’initiatives et de prouesses techniques, on pense à la plateforme Henri de la Cinémathèque française, elle n’a pu remplacer ce sentiment unique de l’expérience collective.

À des dates inhabituelles, le festival de Cannes a pu renaître, deux ans après sa dernière édition, forte d’un dispositif sanitaire qui a fait ses preuves et permis de retrouver un semblant de vie, même diminuée par l’absence de nombreux médias et professionnels étrangers toujours entravés par le COVID. C’est un grand nombre de films issus de ces festivals post-confinements qui s’est embouteillé dans les créneaux de diffusion à destination des exploitants. Si le cinéma est revenu dans le quotidien des français, c’est avec frilosité, tant du coté des gros distributeurs que du public. Un des enseignements de cette année de reprise est une diminution importante de la part des indépendants, qui, s’ils ont offert beaucoup de très belles choses, ont eu bien du mal à trouver leur place dans un agenda si chargé qu’il était difficile de s’y retrouver.

Une inquiétante fracture

Si quelques grosses « locomotives » comme Dune, James Bond ou Spider-Man ont pu maintenir le marché à un niveau acceptable, le cinéma indépendant a besoin de notre passion et de notre soutien tant le moment est difficile pour tous les métiers d’une industrie durement mise à mal surtout pour ses composantes les plus fragiles. L’année 2021 a montré une fracture inquiétante entre une affluence toujours soutenue pour les grandes franchises étasuniennes, notamment les productions Marvel/Disney, et un cinéma indépendant qui peine à arriver jusqu’au spectateur. Deux des plus beaux films sortis sur notre territoire, West Side Story de Steven Spielberg et First Cow de Kelly Reichardt, en sont une illustration étonnante. S’ils viennent du même pays, ce sont deux expressions aussi brillantes que différentes, qui toutes deux n’ont pas réussi à attirer le public.

Scorsese film

C’est pourtant bien cette expression artistique là que nous avons toujours défendu dans nos critiques, et vers les cinéastes des marges que nous avons pris plaisir à aller, préférant défricher et approfondir les regards que de rester dans un périmètre de sécurité conditionné au seul regard hollywoodien. Plus que jamais, il faut valoriser et faire passer cet amour du cinéma qui est le fondement de notre engagement critique. Si cette année 2022 semble être encore bien incertaine et voit flotter devant elle le spectre de nouvelles fermetures et restrictions, il conviendra de rester vigilants et de continuer à porter haut l’expérience collective, ce moment unique où l’on partage des émotions avec des inconnus dans une salle obscure.

Dans ce contexte, Le Bleu du miroir compte bien continuer à faire vibrer tous les regards qui le composent, moins dans un esprit de synthèse que dans une volonté profonde de multiplier les reflets. Autant de sensibilités qui, si elles sont parfois très différentes, regardent toutes dans la même direction. C’est fort d’un esprit combattif que nous comptons repartir vers les nouveaux chantiers de l’année à venir, avec toujours autant de convictions et de motivation. Le cinéma est décidément on ne peut plus vivant, et nous continuerons à le démontrer en ces pages virtuelles avec tout l’amour et la fougue qui nous anime, celui d’un support indépendant présent en festival, dans les salles de patrimoine et les cinémathèques, et bien sûr dans l’actualité des sorties hebdomadaires. Les films, les débats et ceux qui les créent et les animent vont continuer à exister, et nous serons là pour en être des relais exigeants, à l’affut des vibrations d’un monde toujours plus complexe.

La rédaction




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